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Le réutilisable bien souvent meilleur pour le climat que les emballages jetables

Un travail d’analyse mené par Reloop et Zero Waste Europe avec l’Université d’Utrecht a passé au crible plusieurs dizaines d’études comparant l’impact climatique des systèmes de réutilisation des emballages (souvent consignés) par rapport aux emballages jetables. Le sujet est âprement débattu depuis des années puisque les études menées en la matière donnent parfois des résultats contradictoires, en fonction des hypothèses posées au départ. L’ambition de cette recherche est ainsi de compiler tous ces résultats pour comprendre à quelles conditions la réutilisation des emballages constitue un bénéfice climatique par rapport aux emballages jetables.

Les emballages réutilisables : meilleurs pour le climat ? 

32 études ont ainsi été sélectionnées par les auteurs du rapport car elles répondaient à une série de critères attestant de leur sérieux : étude datant de moins de 20 ans, l’analyse du cycle de vie (ACV) réalisée selon les standards ISO 14040- 14044, et comparant deux systèmes d’emballages (jetable/réutilisable) répondant au même usage. 

Premier enseignement : parmi ces études, 23 sur 32 (soit 72%) concluent que les emballages réutilisables sont meilleurs pour l’environnement que leur équivalent jetable. Certaines montrent ainsi que les bouteilles en verre réutilisables produisent 85% d’émissions de gaz à effet de serre de moins que le verre à usage unique, 75% de moins que les bouteilles en PET et 57% de moins que les canettes aluminium.

Cependant, cette seule observation n’est pas suffisante pour affirmer que le réutilisable est toujours plus intéressant pour le climat que le jetable. En effet, les résultats, positifs ou négatifs, vont varier dans chaque étude analysée en fonction de différents facteurs clés listés ci-dessous. Pour les auteurs du rapport ce sont donc sur ces facteurs qu’il faut travailler pour s’assurer que la substitution d’un emballage jetable par un contenant réutilisable sera meilleur pour le climat. 

Le procédé de fabrication de l’emballage 

Pour les emballages jetables, c’est systématiquement la phase de production de l’emballage qui est la plus impactante d’un point de vue climatique. Ainsi, en fonction de sa matière et du procédé de fabrication, l’emballage jetable sera responsable de plus ou moins d’émissions de gaz à effet de serre. 
→ C’est ce qui explique par exemple que toutes les études analysées concluent que les emballages en verre réutilisables sont meilleurs pour le climat que les emballages en verre à usage unique, et ce même à partir d’une seule réutilisation. En effet, la fabrication du verre est fortement émettrice de gaz à effet de serre, qui sont donc évitées à chaque réutilisation d’un emballage; 

Le nombre de réutilisation

Pour les emballages réutilisables, un facteur important du bilan environnemental est bien sûr le nombre de réutilisation de celui-ci. Chaque réutilisation permet en effet de compenser un peu plus l’impact de l’étape première de fabrication de l’emballage. Plus il est réutilisé (évitant ainsi la production de nouveaux emballages), plus l’impact de sa fabrication initiale devient minime. 

 Certaines études analysées indiquent ainsi que substituer une bouteille en PET jetable par une bouteille en verre réutilisable devient intéressant d’un point de vue climatique au bout de 10 ou 20 réutilisations de la bouteille. Une autre étude estime que pour une distance de transport réduite (200km), la bouteille en verre réutilisable est moins impactante que la bouteille en PET jetable dès la troisième réutilisation. Une autre étude estime que pour les gobelets réutilisables, il faudrait 10 réutilisations pour avoir un bénéfice environnemental du réutilisable.

Photo by Matthew T Rader on Unsplash

L’impact du transport

Au-delà du nombre de réutilisation, l’analyse des études montre que c’est aussi le transport notamment entre le lieu de collecte, de lavage et de re-remplissage du contenant (émis à chaque cycle de réutilisation) qui est le plus impactant. La plupart des études qui concluent à un impact négatif des emballages réutilisables le font d’ailleurs pour cette raison : des distances de transport trop grandes. Les émissions de GES dues au transport des emballages réutilisables dépendent elles-mêmes de trois paramètres : les distances, le poids des emballages transportés, et le mode de transport (le transport par bateau est par exemple nettement moins émetteur que par camion).

→ Une des études analysées conclut ainsi que la réutilisation des emballages est intéressante d’un point de vue climatique jusqu’à 1200 km de distance. 

Ainsi, cette vaste analyse des études réalisées sur le sujet permet de conclure que la réutilisation des emballages est bien souvent très bénéfique pour le climat, d’autant plus lorsque les distances de transport sont réduites (ce qui sera typiquement le cas pour un système de consigne en suisse), ou que le système vient remplacer des emballages en verre jusque là jetés après la première utilisation. Pour les producteurs qui voudraient maximiser le bénéfice climatique de leur système de réutilisation, reste à travailler pour : 

  • Assurer un grand nombre de réutilisation, ce qui nécessite bien souvent de mettre en place des systèmes de consigne pour s’assurer un bon taux de retour de l’emballage.
  • Optimiser la logistique : standardiser les contenants, privilégier des emballages empilables et profiter des livraisons de contenants pleins pour reprendre les vides.
  • Réduire les distances de transport entre le lieu de remplissage, de consommation et de lavage. 

Les écueils des méthodes d’analyses comparant emballages jetables et réutilisables

L’analyse de plusieurs études comparant l’impact environnemental du jetable par rapport au réutilisable permet également de pointer certaines limites des méthodes d’analyse utilisées, qui conduisent à favoriser les emballages jetables.

La première est la mauvaise prise en compte, dans les Analyses de Cycle de Vie, des risques de “fuites” dans l’environnement des emballages plastiques, dont on sait qu’elles ont un impact catastrophique sur l’environnement et la biodiversité. Ces risques de fuite, par définition imprévisibles et dépendant fortement du contexte de consommation du produit, ne sont pas forcément comptabilisés.

Autre biais dans les études : les méthodes de comptabilisation des bénéfices du recyclage (qui ont pour effet de réduire l’impact environnemental des emballages jetables dont une partie sera recyclée).

Certaines méthodes de comptabilisation des bénéfices du recyclage ne prennent pas en compte les pertes de matières ayant lieu au moment du recyclage ou l’impossibilité de recycler certaines matières pour fabriquer de nouveaux emballages, aboutissant en quelque sorte à “surestimer” les bénéfices environnementaux réels du recyclage.